Dans un monde où la transformation numérique repose sur des infrastructures et des outils logiciels critiques, le choix des fournisseurs IT est une décision stratégique majeure. Faut-il opter pour une solution de marché, souvent performante mais fermée, ou privilégier des alternatives open source et européennes offrant plus de maîtrise mais avec un risque plus marqué ?
Le dilemme des DSI et responsables IT
Les décideurs IT sont confrontés à un choix difficile :
- Choisir une solution propriétaire : Elle est souvent plus mature, bien supportée, avec un écosystème de services établi. Toutefois, elle expose l’entreprise à une forte dépendance vis-à-vis du fournisseur, qui peut imposer des hausses tarifaires, modifier les conditions d’utilisation ou arrêter certaines offres (comme le rachat de VMware par Broadcom l’a illustré).
- Opter pour une alternative open source ou européenne : Elle offre une plus grande maîtrise des coûts, de l’évolution et de la sécurité, mais nécessite plus d’implication technique et un risque opérationnel accéléré par le manque de support ou de garantie d’évolution.

La problématique des acteurs locaux
Pour le passage à Proxmox, la plus grande problématique fut de trouver un acteur diffusant cette technologie. Si le risque semble important pour un responsable informatique, il semble encore plus critique pour les prestataires locaux. En effet, ceux-ci doivent investir du temps et des ressources pour se former et proposer un support fiable, alors même que la demande reste incertaine face aux géants du secteur.
Pour le choix de Proxmox, seuls deux acteurs ont pu répondre présents (Cylène et Geco-IT). Cette volonté des opérateurs historiques de rester sur le modèle établi peut se comprendre, car ils ont structuré leurs offres autour des solutions propriétaires avec des équipes certifiées et des contrats de support bien établis. Cependant, cela accentue la prise de risque pour les entreprises qui souhaitent basculer vers une solution open source : elles ne changent pas seulement de technologie, mais aussi d’écosystème de support et de partenaires.
De plus, les entreprises qui font ce choix doivent parfois développer en interne des compétences spécifiques pour combler le manque de prestataires spécialisés, ce qui nécessite un investissement non négligeable en formation et en montée en compétence de leurs équipes IT.
Exemple concret : Migration de VMware/Veeam à Proxmox et de Talend à Talaxie
Le cas de Proxmox vs. VMware/Veeam
- VMware/Veeam : Leader historique du marché, très intégré et performant, mais en train de devenir de plus en plus cher et verrouillé.
- Proxmox : Une solution européenne open source offrant une alternative viable, avec une communauté forte et des coûts maîtrisés.
- Impact : En passant à Proxmox, on gagne en autonomie et en réduction des coûts, mais on prend le risque d’un support communautaire moins structuré.
Le cas de Talaxie vs. Talend
- Talend : Solution robuste d’intégration de données, mais devenant de plus en plus fermée depuis son rachat par Qlik.
- Talaxie : Un fork open source européen permettant de conserver une logique décentralisée et plus flexible.
- Impact : Moins de dépendance à un acteur privé, mais un besoin d’investissement pour maintenir la solution.
Les critères à prendre en compte dans le choix d’une solution
- Maîtrise technologique : Qui détient le code source et le contrôle de l’évolution ?
- Support et pérennité : Quelle est la capacité à maintenir la solution en interne ou via un prestataire de confiance ?
- Coût total de possession (TCO) : Une solution gratuite n’est pas toujours la moins chère si elle demande plus de ressources internes.
- Risque juridique et souveraineté : Les régulations sur la protection des données peuvent influencer le choix (ex : Cloud Act vs RGPD).
- Capacité d’évolution : La roadmap est-elle transparente et adaptable aux besoins futurs ?
- Partenaires du changement : Cette nouvelle solution s’intègre-t-elle facilement à votre environnement existant ? Nécessite-t-elle une refonte complète de votre écosystème ? Quel est le risque à moyen et long terme ?
Conclusion
Il n’existe pas de choix universel : chaque décision doit être évaluée en fonction des objectifs stratégiques de l’entreprise. L’important est de comprendre l’équilibre entre la maîtrise et le risque, et d’éviter la dépendance totale à un fournisseur dont les intérêts peuvent diverger de ceux de l’entreprise.
Les solutions open source européennes offrent une alternative intéressante pour reprendre le contrôle de son infrastructure IT, mais elles demandent un engagement et une expertise que les solutions propriétaires atténuent en échange d’une dépendance accrue. Dans un contexte où la souveraineté numérique devient un enjeu majeur, ce type de décision pourrait bien devenir un standard pour de nombreuses entreprises en quête de liberté technologique.